Suscitant toutes les convoitises, l’Afrique est depuis quelques années le terrain d’une guerre informationnelle particulièrement virulente. La population subit durement les jeux de pouvoirs régionaux et d’influence étrangère, amplifiés par la désinformation. Selon une étude de la fondation Ichikowitz, la hausse de la diffusion d’infox porte atteinte au droit à l’information de près de 90 % des jeunes du continent.
Fort heureusement, des initiatives naissent et se multiplient partout en Afrique francophone, contre les fake news et la propagande ! Le 5 octobre 2023, la première organisation indépendante de vérification des faits Africa Check se réunit. En ressortent plusieurs mesures, dont la formation de 200 animateurs pour sensibiliser la jeunesse et Cartooning for Africa Facts, mettant à l’honneur les dessins de presse sur le sujet. Cette année, Factoscope, Africtivistes et Désinfox Afrique œuvrent également en collaboration avec les médias locaux pour la cause.
« Les formations sont très pertinentes. À titre personnel, les modules sur Smart Brevity et Listicle m’ont été d’une grande utilité. Il s’agit de mode de traitement d’articles très pratique et que j’utilise au quotidien », témoigne Cryspin Laoundiki, journaliste pour le média burkinabè en ligne, Le Faso.
Toujours en faveur du droit à l’information, l’organisation internationale de la francophonie (OIF), soutient de nombreux projets depuis fin 2022. Parmi eux, « combattre les fausses informations, ensemble » réunit Togo Check et la fondation Gondwana du Niger. « Formation des réseaux des journalistes d’Afrique centrale sur la protection de leur audience contre les effets de la désinformation » rassemble des professionnels du Cameroun, du Tchad et de République Centrafricaine. Quant au projet « La Trousse » géré par l’association Les Surligneurs, et Ivoire Check, il doit permettre de développer un logiciel de rédaction d’articles et de fact-checking pour le grand public.
Les états eux-mêmes commencent à s’impliquer ! Ce 15 décembre, les autorités camerounaises clôturent Afrique Média. Si cette fermeture soudaine s’explique par un manque de conformité des normes de sécurité sociale, la chaîne télévisuelle panafricaine de renom est également connue pour être un canal de diffusion de propagande de Moscou.
Influence étrangère et mise au pas des médias
En 2023, l’exercice de la profession de journaliste est difficile dans 40% des pays d’Afrique, contre 33% en 2022, d’après Reporters Sans Frontières. Les campagnes omniprésentes de bourrage de crâne compliquent d’autant plus la pratique.
La désinformation provient de différents acteurs, dont de puissances extérieures, comme le cas avéré de la Russie. Sous le soleil subsaharien, les contenus des médias de propagande Russia Today et Sputnik sont actuellement fortement relayés. En janvier, Afrique Media signe un partenariat avec RT. Un an plus tôt, les États-Unis accusent déjà la chaîne d’œuvrer de concert avec Evgueni Prigojine, l’ancien chef du groupe de mercenaires Wagner, opérant sur le continent. Afin d’orienter l’opinion publique, ces plateformes et canaux de communication présentent des alternatives aux perspectives nationales et occidentales. Tout cela, via de la diffusion de contenus politiques et culturels.
Si le Kremlin s’évertue à influencer l’Afrique aujourd’hui, il n’est pas le seul. Un phénomène regretté par le fondateur de l’entreprise panafricaine APO Group qui déclare être déçu « par la croissance de l’influence des médias internationaux sur le continent. Ici on peut citer CNN, BBC, Aljazeera, TV5, etc… Ils parlent de l’Afrique mais ne sont pas Africains […]. »