Depuis le coup d'État du 24 mai 2021, le Mali s’illustre par son instabilité. Cette prise du pouvoir a pour emblèmes une liberté de la presse détériorée et une situation humanitaire, sécuritaire et économique désastreuse.

Depuis le coup d’État du 24 mai 2021, le colonel Assimi Goïta s’est imposé au pouvoir après avoir renversé le président Bah N'Daw et le Premier ministre Moctar Ouane. Officiellement, ce putsch a été justifié par des tensions internes provoquées par un remaniement gouvernemental controversé. Officieusement, il s’agit d’un coup de force militaire visant à conserver le contrôle du pays.

Quelques jours plus tard, le 28 mai 2021, la Cour constitutionnelle légitime le renversement en désignant Goïta président de la transition. Depuis lors, le pouvoir est entièrement concentré entre les mains des militaires, qui exercent une influence totale sur les décisions économiques et politiques du pays.

Les opposants ? Réprimés. Les journalistes ? Réduits au silence.

Le recul inquiétant de la liberté de la presse

Si le Mali n’a jamais été un modèle en matière de liberté de la presse, la situation a pris un virage brutal après 2021.

En 2020, le pays occupait la 108ᵉ place au classement mondial de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières. Après le putsch, il grimpe momentanément à la 99ᵉ place, avant de plonger année après année : 111ᵉ en 2022, 113ᵉ en 2023, et 114ᵉ en 2024. Une descente aux enfers qui reflète parfaitement l’atmosphère de peur et de censure qui règne à Bamako.

Les journalistes sont harcelés, arrêtés, parfois enlevés sans laisser de traces. En novembre 2024, les autorités suspendent la diffusion de la chaîne de télévision Joliba TV après des critiques contre le gouvernement burkinabé. Une décision qui s’inscrit dans une politique plus large de contrôle de l’information.

Le 5 février 2025, un nouveau cap est franchi. Daouda Magassa, membre de la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l'imam Mahmoud Dicko (CMAS), est enlevé en pleine rue à Bamako par des hommes en civil. Il avait osé critiquer ouvertement le régime. Depuis, aucune nouvelle de lui. Les appels internationaux se multiplient, mais le gouvernement garde le silence.

La répression de la presse au Mali s’inscrit dans un contexte de dégradation générale de la situation sécuritaire. En parallèle de la censure croissante des médias, la menace terroriste, renforcée par les mercenaires russes, continue de s'intensifier, comme en témoigne l’attaque près de Gao en février 2025.

La situation sécuritaire au Mali se dégrade fortement

Avant même le coup d’État, le Mali était déjà une cible privilégiée des groupes terroristes. Le 1er novembre 2019, l'attaque du camp militaire d'Indélimane fait 49 morts parmi les soldats maliens, un carnage revendiqué par l’État islamique.

Depuis 2021, la situation ne fait qu’empirer. Les forces de sécurité sont renforcées, les mercenaires russes de Wagner (désormais Africa Corps) sont appelés à la rescousse… mais le constat est implacable : l’insécurité progresse.

Le 7 février 2025, uneattaque djihadiste vise un convoi civil escorté par l’armée malienne et des mercenaires russes est pris pour cible près de Gao.Le bilan de cette attaque est de 25 morts et 13 blessés, selon les chiffres officiels,mais des sources locales parlent de 56 corps retrouvés à l’hôpital. Une énième attaque qui souligne l’échec des autorités à sécuriser le pays, malgré une présence militaire toujours plus importante. Et comme souvent, l’armée malienne et ses alliés russes ne sont pas en reste dans les violences. Human Rights Watch documente des exécutions sommaires, des destructions de villages et des exactions commises sur des civils. La population, prise entre deux feux, ne sait plus vers qui se tourner.

La persistance des attaques terroristes, malgré le renforcement des forces de sécurité maliennes et l'appui des mercenaires russes, révèle l'incapacité à sécuriser efficacement le pays. Ces violences s'accompagnent d'une gestion économique de plus en plus critiquée, où des mesures comme les nouvelles taxes sur la téléphonie et l'exploitation minière illégale aggravent la souffrance des Maliens.

Des ressources économiques au péril de la vie des habitants

L’économie malienne, déjà en souffrance, doit encaisser de nouvelles mesures drastiques. En 2024, le gouvernement instaure des taxes sur la téléphonie, une décision immédiatement critiquée alors que le coût de la vie explose. Officiellement, ces taxes visent à combler une dette publique en hausse. Officieusement, elles frappent de plein fouet une population déjà exsangue.

Mais ce n’est pas tout,le pays souffre de coupures d’électricité récurrentes, qui paralysent l’activité économique et plombent les entreprises. Dans ce contexte, le secteur minier – pilier de l’économie malienne – est lui aussi touché par des drames à répétition.

Le 15 février 2025, l'effondrement d'une mine d'or illégale à Bilaly Koto fait 48 morts, principalement des femmes. Ce site, abandonné par une entreprise chinoise, était exploité dans des conditions précaires par des orpailleurs artisanaux. Un drame évitable, mais loin d’être un cas isolé : l’absence de réglementation dans le secteur minier fait de chaque exploitation un piège mortel.

Le coup d’État a aggravé la situation sécuritaires et humanitaire du Mali. Des exactions commises par les Forces armées maliennes, jusqu’aux atrocités infligées aux civilspar leurs nouveaux partenaires russes, les autorités mettent en danger leur population.

Trois ans après le coup d’État, le Mali est plus que jamais en crise. Loin d’avoir ramené la stabilité promise, le régime militaire a plongé le pays dans un chaos sécuritaire, économique et humanitaire.

La répression des voix dissidentes, la violence des groupes armés et les abus des forces gouvernementales ont transformé la vie quotidienne en un combat pour la survie. Et face à un pouvoir qui se ferme à toute critique, l’avenir s’annonce sombre pour les Maliens.