A l’approche des élections présidentielles, les campagnes de dénigrement et de fausses nouvelles visant certains candidats s’intensifient.
Au Cameroun, la tension sociale s’accentue à l’approche de l’élection présidentielle, dans un climat politique crispé et marqué par une inquiétude grandissante. En cette période pré-électorale, la désinformation prolifère, investissant massivement les réseaux sociaux, où elle se manifeste sous diverses formes. Fausses informations, manipulations et campagnes de dénigrement y pullulent, visant à influencer l’opinion publique, compromettre la transparence du processus électoral et discréditer certains candidats.
Malgré les mises en garde répétées du Conseil national de la communication, du ministère de la Communication et du ministère de l’Administration territoriale, le phénomène ne faiblit pas. Des groupes organisés s’emploient quotidiennement à déformer la réalité, manipulant faits et déclarations des acteurs politiques. Leurs propos, souvent sortis de leur contexte, sont détournés à des fins partisanes, contribuant ainsi à une campagne électorale sous haute tension.
Désinformation électorale : Une stratégie de division au Cameroun
Propos déformés, institutions discréditées, partis politiques tribalisés, leaders d’opinion pris pour cibles : la désinformation s’impose comme un acteur central du paysage politique camerounais.
Sur les réseaux sociaux, elle prend de multiples visages, semant le doute, alimentant la confusion et accentuant les fractures sociales. Ces derniers mois, plusieurs polémiques ont émergé, nourries par des manipulations et des distorsions de faits :
- L’inscription des électeurs étrangers sur les listes électorales
À l’origine de cette controverse, Maurice Kamto, leader du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC), avait dénoncé un manque de transparence dans la délivrance des cartes nationales d’identité, s’interrogeant sur l’identité des électeurs inscrits malgré des difficultés d’accès aux pièces d’identification. Il appelait donc à une vigilance accrue pour éviter que la nationalité camerounaise ne soit attribuée à des fins électoralistes. Ses propos ont ensuite été détournés, donnant lieu à des accusations selon lesquelles des ressortissants étrangers auraient été enrôlés sur les listes électorales avec la complicité d’Elecam, de la Délégation Générale à la Sûreté Nationale (DGSN) et du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC). Cette rumeur, largement relayée, entache le processus en cours de beaucoup d’abstention au sein de la population.
- Les discours de haine et divisions tribales
Les réseaux sociaux deviennent un terrain fertile pour la diffusion de discours attisant la haine et favorisant le repli identitaire.Ces contenus, souvent destinés à manipuler l’opinion publique, visent à discréditer le processus électoral et à attiser les tensions.
- La propagation de fausses nouvelles
Les campagnes de désinformation visent également les candidats à travers diverses rumeurs sur leur engagement et leur positionnement. Certains sont accusés de privilégier un groupe ethnique au détriment de l’ensemble du pays, tandis que d’autres sont présentés comme des agents du pouvoir en place, chargés de semer la confusion au sein de l’opposition. Ces accusations, relayées sur les réseaux sociaux, alimentent la méfiance et perturbent le climat politique.
- La manipulation des médias
Certains médias sont accusés de diffuser des informations biaisées ou fausses pour influencer les électeurs. La CRTV est fréquemment pointée du doigt pour sa proximité supposée avec le parti au pouvoir et Equinoxe TV est perçue comme un média proche du MRC, accusé de relayer des discours de haine et des messages susceptibles de créer des tensions.
La sensibilisation comme arme de prévention
De campagnes de sensibilisation sont mises en place pour lutter contre la désinformation et ses effets. Le Conseil National de la Communication (CNC) mène des actions auprès des médias afin de promouvoir un journalisme responsable. Dans cette dynamique, certains partis politiques ont pris position dans cette lutte, en adoptant des chartes éthiques pour lutter contre les discours de haine et la désinformation, sensibilisant ainsi leurs membres et les citoyens.
Malgré ces initiatives, le défi reste de taille. La régulation des contenus en ligne et la responsabilisation des plateformes numériques sont des étapes essentielles pour assurer des élections libres et transparentes. Une collaboration entre les médias, les institutions et la société civile apparaît comme un levier indispensable pour garantir un climat électoral fiable et serein.
Christian ESSIMI